dimanche 21 septembre 2008

NTM 2008


Samedi 20 septembre, le légendaire duo de hip hop français suprême NTM a donné son troisème concert, et sûrement le plus performant de sa tournée nationale.


C’est sur l’oeuvre magistrale de Carl Orff (Carmina Burana) que les frères « ennemis » Kool Shen et Joey Starr entrent dans l’ « arène », sortis d’une cage d’acier qui s’ouvre et se referme automatiquement durant le concert. Les DJ (James et Naughty J) sont perchés au dessus de la cage d’où sont projetées des jeux de lumières époustouflants. Une mise en scène monumentale digne des plus grosses productions américaines.


Bien sûr NTM a vieilli. Il aurait été invraisemblable qu’ils fassent un show identique à celui de 98. L’urgence n’est plus la même. La motivation qui les rassemble aujourd’hui se réduit au plaisir de la scène plus qu’à une velléité désuète de revanche sur le « système » dont ils se sont longtemps fait les incendiaires porte-parole. Qu’à cela ne tienne, leur énergie virulente et contagieuse n’a pas diminué, ou à peine. Porté par un public ardent et survolté, celui que l’on surnomme Jaguarr Gorgone s’en donne à coeur joie sur scène, se montre généreux et n’hésite pas à baisser les armes avouant « je suis ému » ou clamant à sa mère (absente) « je t’aime je t’aime je t’aime ». Kool Shen non plus n’hésite pas à se livrer lors de son vibrant hommage à Lady VI, sa défunte compagne qui a officié à ses côtés pendant 10 ans. Il semble que les deux éternels rageux ont (et heureusement) grandi et mûri.


Contrairement à la tournée de 1998, ils ont fait appel à de grands musiciens, guitaristes jamaïcains venus de Londres. Accompagnés de sulfureuses danseuses pour la chanson « Ma Benz », de choristes, de danseurs, d’un beatboxer et bien sûr de leurs acolytes de l’époque Zoxea, Busta Flex, Afro Jazz, Lord Ko, Kool Shen et son alter ego rendent un véritable hommage à la scène hip hop comme eux seuls sont capables de le faire. Finies les instrus envoyées par des DJs, le live est accoustique et de haute qualité. La nostalgie de 98 bien présente est mêlée d’une évolution musicale intelligente et bien menée. Il est à regretter cependant que la sonorisation désastreuse amoindrisse le résultat final.
Annoncée comme la dernière, cette tournée porte l’infernal duo en triomphe et lui offre enfin la consécration qu’il a toujours méritée.

jeudi 5 juin 2008

Donner du sens à l'absurde

Jeune dramaturge et metteuse en scène de 24 ans , Aurélie Kavafian a présenté les 2,3 et 4 juin 2008 sa première pièce « La Jeune Fille Entre Autres », à l'Aire Falguière (Paris 15è). Une comédie absurde fondée sur une gigantesque mise en abyme menée avec brio.

Mélisande Guessoum, comédienne principale de la pièce y joue une metteuse en scène,égarée, délurée, qui, tout au long de la pièce est en quête d’un personnage à qui elle voudrait donner forme. Aidée par des acolytes plus loufoques les uns que les autres, elle poursuit sa reflexion sur ce personnage complexe qui n'existe pour l'instant que dans son intellect. Elle rêve d'un personnage sincère, touchant, avec une histoire, des failles, des attentes, des envies, des différences, des incompréhensions, en somme une jeune fille humaine et sincère qui peine à trouver sa place et le sens de son existence. Au fur et à mesure de sa quête, la metteuse en scène, vêtue d'une jupe de papiers noircis de texte , s'égare jusqu'à nier le monde qui l'entoure.

A travers un dialogue savamment écrit, Aurélie Kavafian n’hésite pas à se mettre à distance d’un texte philosophique abstrait. "Intellect sors de cette pièce » crie la metteuse en scène pour casser cette pesanteur des mots. Les 5 personnages qui l'aident dans sa quête vaine semblent survenus de nulle part, émergeant du public dont l'existence même est remise en question.

La pièce est un immense capharnaüm entre identité, quête de soi, existence et non existence. On se demande qui existe vraiment, qui cherche qui, qui se sait, qui sait l'autre, quel sens peut on trouver à quoi, à qui..et au milieu de ce chaos charmant et drôle auquel le public est mêlé, convié, entraîné, il y a cependant une cohérence. Aurélie Kavafian cherche un sens à travers l’absurde et cette reflexion transparaît de bout en bout de la pièce. Elle explique la difficulté d’exister différement dans une société aux mille et une névroses, la difficulté de se trouver soi mais aussi la beauté de cette quête.

Il faut saluer la performance de Mélisande Guessoum qui tient quasiment à elle seule la pièce. Une interprétation juste et ennivrante dont elle sait se dégager par le rire. Mélodies au piano, danse, chant donnent à cette pièce une touche colorée et aérienne.
Une première pièce qui pose les jalons d’un style kavafien décidément hors du commun.

Gaëlle Borgia

dimanche 1 juin 2008

Teeth, comédie terrifiante de Mitchell Lichtenstein

Teeth, premier film de Mitchell Lichtenstein actuellement sur grand écran, revisite le mythe ancestral du « vagin dentata ».

Interpretée par Jess Weixler, Dawn, une jeune étudiante américaine s’évertue à prôner l’abstinence jusqu’au mariage, jusqu’au jour où elle s’éprend d’un beau brun de son lycée. Le jeu du chat et de la souris n’étant pas éternel, elle finit par se laisser aller aux plaisirs charnels avec son bel éphèbe. Réticente à aller jusqu’au bout de ce qu’elle considère comme le péché ultime, Dawn découvre que son vagin est un ignoble instrument mutilateur... à dents!

Lichtenstein a réussi le pari de faire de ce mythe terrifiant une comédie. On se surprend à rire de voir des sexes d’hommes mutilés en sang. En effet c’est au summum du plaisir qu’ils se voient amputés de leur membre cher, au moment où ils se sentent le moins vulnérables. Des situations cocasses où la plus prude des prudes effrayée par le sexe fort devient une prédatrice contre son gré. Jess Weixler interprète intelligemment son rôle d’adolescente élevée dans la négation du sexe.
Lichtenstein nous propose une critique originale des tabous et de l’hypocrisie qui règne autour de ce qui touche de près ou de loin au sexe. Dawn, devenue malgré elle, maîtresse de sa libido et de son corps, acquiert, quoique difficilement, une indépendance sexuelle et un pouvoir sur l’homme que son éducation puritaine ne lui aurait jamais attribué. Une situation improbable provoquant des situations effroyablement cocasses qui laissent le public pantois sans pourtant lui proposer une réflexion de fond.

Gaëlle Borgia

jeudi 8 mai 2008

Le covoiturage, la route et l'inconnu

Montpellier-Paris, Lyon-Marseille, Paris-Bordeaux pour 30 euros ? C’est maintenant possible grâce au covoiturage.
Qualités requises : avoir le goût de l’inattendu, une bonne dose de sociabilité et une ponctualité sans faille. Simple, convivial et pratique, le covoiturage est la solution idéale contre la vie chère.

Avec la flambée du prix de l’essence, le voyage en voiture devient un luxe. Partager une voiture et les frais de déplacement avec des inconnus : nombreux sont ceux qui ont franchi le pas. Les sites de covoiturage pullulent sur la toile (123envoiture.com, covoiturage.fr, covoiturage.com). En une semaine, le site national du covoiturage www.covoiturage.fr a enregistré 24303 annonces. Pour un aller Paris-Lyon par exemple, la participation aux frais est de 30 euros par passager. Toutefois, les prix peuvent varier selon les destinations et le nombre de personnes présentes à bord.
Un coup de fil au conducteur suffit pour se proposer comme passager. Objectif : convenir d’une heure et d’un lieu de RDV.

C'est à un endroit défini au préalable par le conducteur qu'a lieu la rencontre improbable avec ceux dont on va partager la vie pendant quelques heures de route. Chacun redouble d’effort, de douces paroles, de sourires, de blagues pour que le voyage soit agréable pour l’autre. Pas de doute, les covoitureurs ont le sens de l’accueil et de la vie en communauté. Une jolie leçon d’humanité et de simplicité.
Une fois écumés les sujets de conversation sur le coût de la vie, le pouvoir d’achat, les prix exhorbitants des billets SNCF, d’Air France, de l’essence, de la vie professionnelle de chacun, les échanges laissent place aux baillements et clignements de paupières alourdies, bercées par le ronronnement du moteur.

A l'arrivée, les adieux sont brefs, les efforts de bienséance moins prononcés, mais la satisfaction est palpable, celle d’avoir fait un voyage plaisant dans une bulle éphémère de bonne humeur.

Redécouvrir l’essence du voyage fait de rencontres, d’imprévus et de risques, le covoiturage est une expérience à tenter pour tous ceux qui sentent au fond deux, brûler la petite flamme du vrai voyageur!

Gaëlle Borgia

dimanche 13 avril 2008

un concentré de superficialité


Andrew Payne présente actuellement au studio des Champs Elysées « Le Plan B », pièce contemporaine mise en scène par Michel Fagadau dans laquelle il aborde la difficulté et le cynisme des relations humaines.

Un couple qui bat de l’aile entre adultère et routine, un célibataire misogyne qui s’entiche d’une jeune artiste délurée : "Le Plan B" d'Andrew Payne s’enferme dans des clichés surannés sur la décadence du couple et le cynisme de notre époque. Malgré un Robert Plagnol talentueux qui s’évertue à donner de l’épaisseur et de l’humour à son personnage de célibataire endurci et cocaïnomane, il ne réussit pas à sortir la pièce de sa mise en scène banale et de ses dialogues plats qui virent au vulgaire sans raison. Excepté la bonne performance de Robert Plagnol, on assiste à un défilé d’acteurs fades, enfermés dans des stéréotypes. Aure Attika, mère de famille et femme adultère malheureuse a des allures navrantes de top model sans expression. Natacha Régnier, en hurluberlue, enfantine et extravagante n’aborde son rôle qu’en surface. Reste Thomas Chabrol, père de famille et mari détestable, riche banquier plein de mépris et sans âme qui finit sa prestation comme il la commence. D’une banalité exaspérante et d’une épaisseur nulle, il demeure à l’image de la pièce. Un résultat peu probant par manque cruel de consistance à tous les niveaux.

Gaëlle Borgia

jeudi 10 janvier 2008

Place au journalisme-business

Fini le journaliste perdu dans une petite ville, écrivant dans l'hebdomadaire local, ou dans un canard alternatif et qui finit, si tant est qu'il a du talent, dans un quotidien national. Le journalisme n'est plus ce qu'il était et les futurs journalistes le savent. Dans un monde ou Internet règne en maître, où les jeunes ne jurent plus que par Facebook, une nouvelle génération de journalistes est née.

Le New-York Times s'intéresse dans un article à ces nouveaux journalistes qui exploitent toutes les nouvelles technologies pour publier leurs articles ou pour se lancer dans un business. Il s'agit d'étudiants de la nouvelle école de journalisme de la City University de New-York qui savent, plus que leurs aînés, utiliser tous les ressorts internet. Le tout est de vendre et d'être lu par le plus grand nombre d'internautes. Fini le journalisme pour le journalisme. Place au journalisme-business!

mercredi 9 janvier 2008

Depuis mai 2007, date de sa création, le succès de rue89.com ne faiblit pas. Site d'information interactif lancé par d'anciens journalistes de Libération, il balaie toute l'actualité nationale et internationale, la commente, la critique, l'analyse. Les articles sont faciles à lire. On y trouve des vidéos, des plages audios, des photos, des liens. C'est un site riche et complet car toutes les possibilités offertes par l'outil internet sont exploitées au service de l'information. La diversité du site le rend attrayant, dynamique et sonore comme pourrait l'être une rue, ce qui expliquerait son nom...


La Longue Traîne

Dans le langage internet, qu’entend-on par « long tail » ? La majeure partie des internautes ne le sait sûrement pas. Appelé en français « longue traîne » ce concept a été développé par Chris Anderson en 2004, à l’époque où il était rédacteur en chef du magazine Wired.
On appelle long tail tous les produits peu connus du grand public par opposition aux produits populaires. Sur internet les long tails sont beaucoup plus importants que dans les magasins ordinaires parce que le public a accès à un plus grand nombre de produits et donc est plus à même de consommer des produits moins populaires. Selon Chris Andersen et d’autres spécialistes, les produits peu demandés par le grand public sur internet peuvent, si on les assemble, représenter une part de marché égale ou supérieure à celle des best-sellers. Pour que cela soit possible, il faut que les canaux de distributions permettent aux commerçants de proposer un large choix aux consommateurs. Des sites internet comme Amazon.com, Netfix ou Rezolibre.com permettent ce genre de commerce car ils proposent une large variété de produits allant des plus populaires aux moins connus.
« La longue traîne » représente donc tout ce marché de l’ombre, qui est accessible par le biais d’internet mais rarement dans les médias généraux. Sur le site Amazon.com par exemple, les livres jamais vendus auparavant ont autant de succès que les livres qui ont toujours eu des acheteurs. Sur le dictionnaire en ligne Wikipedia, les articles peu lus de ont, à eux tous, plus de lecteurs que les articles principaux.
La longue traîne se présente sous forme d’un graphique avec d’un côté la part des produits les plus fréquemment achetés. Puis la courbe diminue en une « longue traîne », d’où son nom.





Dans ce graphique, les articles les plus fréquemment lus se trouvent dans la partie verte et ceux qui sont beaucoup moins populaires sont représentés par la partie jaune.

Avoir une long tail pour un magasin ou un site internet dépend beaucoup du coût de stockage et de distribution. Plus il est élevé et moins il y aura de produits proposés. Si le coût de stockage et de distribution est élevé, seuls les produits les plus populaires sont mis en vente car leur rentabilité est plus sûre. Lorsqu’une entreprise a la possibilité de stocker un grand nombre de produits et de financer une distribution importante, elle a plus de chances d’avoir une « longue traîne ».


La longue traîne signifie plus de choix pour les consommateurs donc plus de diversité. Le développement des long traînes peut augmenter considérablement le niveau culturel d’une société. On peut dire qu’il y a un effet « longue traîne » à partir de 500 références. Des sites comme eBay, google, Amazon ont compris l’importance de la longue traîne. 35% du chiffre d'affaires d’Amazon.com est directement issu du moteur de recommandation interne du site, soit plus de 700 millions de dollars. Ce concept est particulièrement adapté au modèle de distribution du Web car le coût de mise en ligne d'un produit supplémentaire est marginal et les étalages virtuels des sites e-commerce sont infinis, contrairement aux magasins physiques qui doivent se borner à ne proposer que les meilleures ventes afin de rentabiliser au maximum l'espace.

Le concept de long tail est en fait l’opposé de l’« effet superstar ». Phénomène économique étudié par Sherwin Rosenref, l’effet « superstar » désigne le fait qu’un nombre réduit de produits domine un marché. Contrairement à l’effet « superstar », la longue traîne favorise l'émergence d'une agrégation de marchés de niche où des produits très spécialisés seront proposés à la vente et finiront très probablement par trouver preneur. "Le principe est simple : il permet d'associer un produit rare à une audience", explique Mihai Crasneanu, le Pdg du loueur de DVD en ligne Glowria.fr.
Le danger de la long tail : un trop plein de produits proposés sur certains sites. Le moteur de recommandation Criteo propose ainsi une solution permettant de lutter contre l'excès de références produits. Des sites tels que Amazon ou le loueur de DVD Netflix aux Etats-Unis proposent plusieurs dizaines de milliers de références.

Le but maintenant pour les ecommerçants est d’exploiter au mieux leur longue traîne et ne pas laisser le consommateur crouler sous des milliers de références qu’il ne pourra pas parcourir entièrement. Il faut analyser le profil des internautes en fonction de leur historique d'achat ou de leur comportement pour suggérer de nouvelles références.
Ce concept encore nouveau pourrait engendrer de gros changements culturels. "Nous allons progressivement nous éloigner d'un marché qui privilégie les têtes de gondoles, ce qui implique des changements opérationnels au niveau du marketing", explique le Pdg de Criteo. Même si les produits populaires dominent le marché et les médias, l’exploitation de la long tail semble être l’avenir de l’e-commerce.